Les limites administratives sous l'Ancien Régime, et leur apport aux recherches généalogiques
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Un peu d'histoire locale...
le 14/05/2020 à 10:50 Citer ce message
Les limites administratives sous l'Ancien Régime, et leur apport aux recherches généalogiques, par Isabelle VERNUS, directrice des Archives départementales de Saône-et-Loire
Conférence faite par madame Vernus lors de l'Assemblée générale du CGSL en 2006.
Sans négliger les archives privées comme la correspondance familiale, il faut admettre que les recherches généalogiques progressent principalement grâce à des sources d'origine administrative au sens large du terme, qu’il s'agisse d'administrations civiles ou religieuses. Plus précisément, les occasions qui permettent à un généalogiste de repérer son ancêtre ne se présentent guère qu’à l'occasion d’un contact que celui-ci a pu avoir avec une administration, à un certain moment de son existence. Par exemple, il est allé à l'école, il a passé un examen, il a fait son service militaire, il a signé un contrat de mariage, il a été recensé, il a été impliqué dans un procès, il est entré à l'hôpital, il est mort, il a été enterré... Ce contact ne s'établit pas au hasard, et pas non plus avec une administration choisie par l'individu : l'organisation collective est telle que chaque structure administrative dispose d'un ressort, d'un territoire de compétence ; aussi la plupart des actes administratifs sont-ils faits selon des règles bien précises. Cette affirmation peut être nuancée pour ce qui concerne le processus d'authentification des actes, car si la logique de proximité, le plus souvent, prédomine dans le choix d'un notaire, on sait aussi que la tradition familiale pèse d'un certain poids.
Les contacts de l'individu avec l'administration ont, souvent, laissé des traces écrites que le généalogistes piste dans les registres et les dossiers d'archives, et dont il tire des éléments qui enrichiront ses connaissances. Or il faut savoir que les archives sont organisées suivant un double principe : le principe de provenance et celui du respect des fonds. Cela signifie qu'un ensemble de documents de même origine, provenant du même organisme, ne sera pas éclaté et qu'inversement, deux documents portant sur le même sujet mais provenant d'organismes différents ne seront pas physiquement regroupés. Pour l'archiviste, respecter les fonds signifie encore conserver autant que faire se peut le classement initial des dossiers. L'exemple le mieux connu des généalogistes est celui des registres paroissiaux et de l'état civil, constitué en double exemplaire conservés, l'un en paroisse (puis en mairie), l'autre au greffe du bailliage (puis au greffe du tribunal d'instance). Une fois versés aux Archives départementales, ces deux exemplaires d'une même paroisse, ne sont pas rapprochés, les deux collections subsistent sous deux références distinctes, l'une en série E, l'autre en E dépôt.
Sans connaissance de la compétence géographique de l'administration au sein de laquelle le généalogiste mène ses travaux, c'est à dire sans connaissance de sa circonscription, toute recherche systématique est impossible : selon l'expression des historiens, on fait de la « pêche à la ligne ». Mieux encore, il faut connaître l'évolution de cette circonscription dans le temps. Elaborer sa généalogie sans prendre garde aux données de la géographie historique peut donc être source d'erreurs, d'impasses ou incompréhensions.
Or cette géographie historique est complexe. En effet, par le passé, les ressorts des différentes administrations ne se sont que rarement juxtaposés. Inversement, le ressort d'une même circonscription a pu beaucoup évoluer au fil du temps. Là n'est pas la seule difficulté : les inventaires d'archives ne font pas toujours mention des circonscriptions des administrations dont ils décrivent les documents, alors que c'est là que les chercheurs devraient les trouver le plus aisément. A la décharge des professionnels, il faut reconnaître que les textes décrivant ces ressorts sont eux mêmes souvent difficiles à repérer, car étant d'un intérêt temporaire pour les administrations de l'époque, ils ont souvent été détruits. Sous l'Ancien Régime, les documents fixant les limites de circonscriptions n'ont parfois jamais existé, la coutume suffisant aux besoins de l'époque ; seule une contestation, un procès, avec ses pièces écrites, peut fournir l'occasion d'une enquête et d'une verbalisation, puis d'une rédaction, des limites. Ceci est particulièrement vrai pour les limites de fiefs.
L'objectif de l'exposé n'est évidemment pas de dresser un panorama complet des arcanes de la géographie historique française, qui d'ailleurs continue à se construire bribe par bribe au fil des inventaires d'archives et des recherches : clairement, on est encore très très loin de connaître toutes les limites de toutes les circonscriptions ayant existé en France. En revanche, je souhaiterais vous sensibiliser à cette question en attirant votre attention sur quelques cas particuliers et quelques pièges à éviter.
à suivre... -
le 05/11/2020 à 12:48 Citer ce message
Bonjour,
Je viens de relire les articles de Madame Vernus sur les limites administratives sous l'Ancien Régime : travail remarquable et très utile pour les généalogistes (ex concept d'hameaux alternatifs.
Je l'en remercie vivement et me permets d'inciter les membres de notre antenne creusotine à en faire de même, s'ils le souhaitent.
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